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CHAPELLE           le 11- 31octobre 1997

Ici, c'est mon atelier, l'atelier-sculpture du centre d'art de Moly-Sabata à Sablons prés de Lyon. J'y suis invité avec trois autres artistes pour une résidence de deux mois (du 16 sept au 15 nov 1997) par la fondation Albert Gleizes ainsi que par la DRAC Rhône Alpes. Ce centre d'art est constitué d'une vieille bâtisse du 17éme siècle (ancienne maison de bateliers), de quatre ateliers d'artistes et d'un atelier poterie et d'un atelier sculpture. Ce dernier se trouve au fond d'un grand jardin, celui-là même que l'on peut voir sur la photographie ci-dessus. En y pénétrant pour la premier fois, j'ai été saisie par une étrange sensation, comme si j'entrais dans un espace sacré. Ce n'est que par la suite qu'on m'appris qu'il s'agissait là d'une ancienne chapelle. Deux portes permettent d'y entrer, l'une au milieu du coté jardin, l'autre du coté Est. Elle comporte également cinq fenêtres dont une donne sur le Rhône, et dont les deux autres sont au plafond, qui habite aussi de nombreuses araignées. Elles se le sont appropriées en y tissant leurs toiles. Ce lieu a fait naitre en moi l'envie de réaliser un projet qui sommeillait dans mon esprit depuis longtemps déjà, à savoir étendre, disposer le fil directement au sol. Il s'agissait là suivre le fil avec mon corps, de suivre le déroulement du temps dans un espace ouvert. Pour ce faire, j'ai d'abord consciencieusement nettoyé le sol et les murs et isoler la porte Est pour que les courants d'air ne viennent pas perturber mon travail. Le 11 octobre, quand cela fut fait, j'ai pu enfin me mettre à l'oeuvre. Les deux premiers jours, j'ai travaillé de 12 à 14 heures. Mais déjà, je m'apercevais que tout cela allait bien trop vite et qu'avec un tel rythme, il me faudrait quitter ce lieu plus rapidement que je ne le souhaitais. C'est un peu comme si je voulais y travailler le plus longtemps possible, faisant de cette expérience un travail journalier de la même façon enfin de compte qu'on rédige un journal de bord. C'est ce qui me poussa à me fixer un horaire quotidien d'une heure, à l'exception du Dimanche, le seul jour de relâche dans 'ma Chapelle'. J'ai commencé à investir l'espace du coté Est sous la fenêtre en y déroulant le fil de gauche à droite un peu comme si j'écrivais. Un jour, deux jours, trois jours...je travaillais toujours en silence, sans que jamais personne ne vint me déranger. En silence, comme les araignées au dessus de moi, au plafond. On s'entendait plutôt bien. Je n'avais pas de plan précis, ni de modèle pour ce travail. Je déroulais, happée dans le mouvement du fil, aspirée dans ce qui prenait forme sur le sol et guidée par ma seul intuition. Je déroulais le fil avec une seul certitude en moi, à savoir qu'au dernier jour de résidence tout cela sera brulé. Peu importe d'ailleurs, car il n'y avait pas de but à ce travail. Seules comptaient l'intensité ou la pureté de mon intention, et la sincérité envers moi-même à ce moment-là. C'est étrange d'ailleurs à quel point je me sentais toujours animée, lorsque je quittais chaque jour ce lieu, de sentiments de sérénité, de bonté et de paix.

                                       le 2 Novembre 1997,  à Moly-Sabata,  myung- ok HAN

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